Blanquer : un « formidable » ministre ; ça craint !

samedi 16 septembre 2017


source Médiapart le 4 sept. 2017 Par claude lelièvre
Blog : Histoire et politiques scolaires

C’est du moins ce que le Président de la République a affirmé dans son interview
au « Point » :

« Jean-Michel Blanquer est un formidable ministre de l’Education nationale ».
On ne peut que lui donner raison, car il y a beaucoup à craindre de la part de Blanquer.

Emmanuel Macron est marié à une professeure de lettres classiques et il est lui-même un fin lettré. Il ne saurait ignorer la définition du dictionnaire ’’Littré’’. « Formidable : capable d’inspirer la plus grande crainte. Du latin ’’formidabilis’’, venu lui-même de formidare, redouter ; et de formido, crainte ».

Et, en effet, n’y a-t-il pas beaucoup à craindre d’un ministre de la République qui prétend mettre fin à une « interdiction » du redoublement qui n’existe pas, ou qui s’en prend à une « méthode globale » qui a disparu (de son propre aveu finalement) ?

N’y a -t-il pas beaucoup à craindre de quelqu’un qui se vante par avance d’être exceptionnellement un ministre de l’Education nationale qui ne donnera pas son nom à une loi (alors que c’est le cas déjà de plus des trois-quarts de la trentaine des ministres de l’Education nationale qui se sont succédé sous la cinquième République) ?

Et un ministre qui prend immédiatement avec beaucoup de précipitation deux décrets de ’’détricotage’’ : le décret (à interprétation à géométrie variable) pour le collège, et le décret ’’Ponce Pilate’’ sur les rythmes scolaires dans le primaire. Laisser-faire voire laisser-aller. Serait-ce cela l’horizon de sa ’’confiance’’ proclamée envers les enseignants ?

N’y a-t-il pas beaucoup à craindre d’un ministre qui enjoint ( ’’en même temps’’ et tout de go) à tous les établissements scolaires de « rentrer en musique », et aussi à tous les CM2 de trois académies de promouvoir la lecture des « Fables de La Fontaine » (sans craindre lui-même la contradiction avec ses professions de foi envers la confiance à accorder aux établissements, aux enseignants) ?

Un ministre qui annonce au dernier moment la mise en place (non concertée avec les intéressés) d’ « évaluations » en début de sixième et même de CP ?

N’y a-t-il pas beaucoup à craindre d’un ministre qui déclare avoir la préoccupation de fonder autant que faire se peut sa politique sur des données scientifiquement établies et qui ne craint pas de déclarer urbi et orbi sur BFM : « Si vous prenez le cas des vacances de la Toussaint, qui durent deux semaines, ça m’a toujours semblé un peu long. D’autant plus que j’ai constaté que c’était un facteur de décrochage pour certains élèves au cours du premier trimestre ».

Il a « constaté » ! Quand, comment ? Mystère (d’autant qu’il n’a jamais été professeur autrement qu’à l’université). Jean-Michel Blanquer (alias Raymond la science) disait fonder ses décisions sur le pragmatisme et la science. Maintenant il la fait !

Oui, il y a beaucoup à craindre de lui ! Et on n’a pas tout dit ; et ce n’est pas fini ! « 

Le ministre de l’Education nationale Jean-Michel Blanquer est formidable ». Un grand merci, monsieur le président de la République, pour avoir trouvé le mot juste.