Droit privé : rupture conventionnelle, un progrès social ?

mercredi 30 juillet 2008


Ce nouveau dispositif de « rupture à l’amiable » pourrait paraître séduisant de prime abord. Cependant, il fait l’impasse sur l’inégalité des deux « contractants » : l’employeur trouve ici un moyen supplémentaire pour licencier sans douleur, le salarié n’ayant que le choix de partir dans de meilleures conditions que la démission ... si l’employeur l’accepte.

On sort ici d’une logique de droit social (la protection du faible face au fort) pour aller vers une logique de marché où tous les acteurs ne sont pas égaux.

La loi de « modernisation du marché du travail » a été publiée le 26 juin 2008. Celle-ci retranscrit les dispositions de l’accord conclu le 11 janvier 2008. Elle instaure cette « rupture conventionnelle » du contrat de travail, autrement dénommée rupture amiable ou d’un commun accord.

Les décrets d’application et arrêtés relatifs à cette loi concernant, notamment, le montant de l’indemnité légale de licenciement et l’homologation de la rupture conventionnelle du contrat de travail sont parus au Journal Officiel du 19 juillet 2008 (décret n°2008-715, décret n°2008-716, arrêté du 18 juillet 2008).

Exemple concret : M. Martin, employé, relevant de la convention collective des cabinets d’étude et d’ingénieurs Conseil (3018), dont le salaire mensuel moyen brut sur les 12 derniers mois est de 1 800 € et qui a 9 ans d’ancienneté.

Quelles seront les conséquences pour lui selon le mode de rupture ?

Modalités de la ruptureDémissionLicenciement pour motif personnelRupture conventionnelle ou amiable
Initiative de la rupture Le salarié L’employeur Le salarié et l’employeur
Nécessité de justifier d’un motif de rupture Non Oui Non
Entretiens Non Oui Oui
Nécessité d’un écrit formalisant la rupture Non Oui. L’employeur devra lui adresser une lettre de notification du licenciement contenant les motifs du licenciement Oui. Une convention de rupture amiable devra être signée entre le salarié et l’employeur
Préavis Oui. La durée dépend de votre convention collective

Pour M. Martin : 1 mois

Oui. La durée dépend de votre convention collective

Pour M. Martin : 1 mois

Non. La rupture intervient le lendemain de l’homologation de la convention (délai de rétractation de 15 jours puis 15 jours pour homologation)
Indemnités de rupture Non Oui (sauf faute grave ou lourde). Le montant dépend de votre convention collective

Pour M. Martin : 4 050 € (1)

Oui. Le montant ne peut être inférieur au montant de l’indemnité légale de licenciement

Pour M. Martin, minimum : 3 240 € (2)

Droit de percevoir les allocations chômage Non sauf s’il s’agit d’un cas de démission considérée comme légitime par les ASSEDIC Oui Oui
Possibilité pour le salarié de contester la rupture devant le juge Oui Oui Oui

(1) Extrait de l’article 19 de la convention collective des bureaux d’études techniques et d’ingénieurs conseils, sociétés de conseils relatif au montant de l’indemnité conventionnelle de licenciement.
« E.T.A.M. :
L’indemnité de licenciement se calcule en mois de rémunération sur les bases suivantes :
 pour une ancienneté acquise entre deux ans et vingt ans : 0,25 de mois par année de présence ;
 à partir de vingt ans d’ancienneté : 0,30 de mois par année de présence, sans pouvoir excéder un
plafond de dix mois ».

(2) Le décret n° 2008-715 du 18 juillet 2008 portant diverses mesures relatives à la modernisation du marché du travail fixe désormais le montant minimal de l’indemnité légale de licenciement, à 1/5e de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent 2/15e de mois par année au-delà de 10 ans d’ancienneté.

Source Juritravail