Retraites des femmes : en parler, se mobiliser !

lundi 8 mars 2010


Les femmes premières touchées par la régression sociale !

Depuis 1993, les réformes des retraites se succèdent, touchant les secteurs privé, public, les régimes spéciaux. En refusant de s’attaquer au problème de fond qui est l’inégal partage de la richesse produite, elles ont entraîné une baisse générale du niveau des pensions.

A chaque fois, les femmes paient le prix le plus fort et les réformes creusent davantage les inégalités de pensions entre les hommes et les femmes.

En 2010, de nouvelles mesures sont annoncées concernant l’allongement de la durée de cotisation et le report de l’âge de départ à la retraite de 60 ans, qui toucheraient à nouveau particulièrement les femmes. Celles-ci ont en effet des carrières en moyenne plus courtes que les hommes : en 2004, seules 44% des femmes retraitées avaient pu valider une carrière complète contre 86% des hommes.

A cela s’ajoute le fait que l’âge du premier emploi est de plus en plus élevé, notamment pour les femmes en raison d’un plus fort chômage et en dépit d’un meilleur niveau de diplôme. Cotiser un nombre d’annuités toujours croissant pour obtenir une pension à taux plein est donc de plus en plus difficile, ce qui se traduit concrètement par une baisse des pensions.

Toute mesure allongeant la durée de cotisation et repoussant l’âge de départ est dans les faits discriminante envers les femmes.
Pour résoudre la question du financement des retraites, au lieu de se focaliser sur l’emploi des seniors, il serait plus efficace de favoriser l’emploi des jeunes et des femmes.

L’emploi des femmes, outre qu’il est la condition de leur autonomie, est un domaine où les politiques publiques peuvent jouer à fond en supprimant les obstacles qu’elles rencontrent, c’est-à-dire en luttant contre le temps partiel non choisi, en développant des structures d’accueil de la petite enfance, d’aide aux personnes dépendantes, etc. Ces activités répondent aux besoins sociaux et sont elles-mêmes créatrices d’emplois.

Arrêter les régressions, améliorer les retraites, aller vers l’égalité entre les hommes et les femmes, c’est possible par le partage des richesses et le partage de l’emploi.

 Fortes inégalités entre les femmes et les hommes

 En 2004, les femmes retraitées de 60 ans et plus percevaient une retraite moyenne (droits propres, dispositifs familiaux et minimum vieillesse) de 1 020 € par mois, soit 62 % de celle des hommes (1 636 €).

 Si on considère les seules pensions de droit direct (sans pensions de réversion et sans dispositifs familiaux), l’écart est plus fort : les femmes perçoivent 746€, soit 48% seulement de celle des hommes (1550€).

 La fonction publique est moins inégalitaire : la pension moyenne des femmes représente 77% de celle des hommes.

 La moitié des femmes retraitées avaient en 2004 une retraite inférieure à 900 € contre 20 % des hommes.

 Du fait de l’insuffisance des droits acquis, les femmes liquident leur retraite en moyenne plus tard que les hommes (1,4 an pour la génération 1938).

 Trois femmes sur dix doivent attendre l’âge de 65 ans, borne à laquelle ne s’applique plus la décote qui abaisse la pension en cas d’annuités manquantes. A noter que cette borne de 65 ans reculerait également si l’âge légal de départ à la retraite est reculé, ce qui pénaliserait largement les femmes.

 Dans la fonction publique, la loi Fillon de 2003 a réduit les majorations de durée d’assurance pour les enfants dont bénéficiaient les femmes : depuis, pour compenser cette réduction, l’âge moyen de départ en retraite des femmes a reculé nettement plus que celui des hommes.

 Les femmes sont majoritaires parmi les prestataires du minimum contributif et du minimum vieillesse. Fin 2007, 70% des retraités du régime général percevant le minimum contributif sont des femmes.

 Les bonifications pour avoir élevé 3 enfants ou plus rapportent deux fois plus aux hommes qu’aux femmes, alors que ce sont les femmes qui sont en grande majorité pénalisées par l’éducation des enfants. Ce qui vient du fait que ces bonifications sont calculées en proportion du salaire (10%).

 Le risque de pauvreté est aggravé chez les femmes seules, et cela est vrai dans toute l’Union européenne : un quart des femmes retraitées isolées vivent sous le seuil de pauvreté qui est défini à 60% du revenu médian national.

 Les propositions de Solidaires

Les inégalités dans les pensions ne disparaîtront qu’avec la disparition des inégalités sur le marché du travail, avec notamment le droit pour toutes et tous à un emploi à temps plein, de qualité. Cela n’empêche cependant pas d’avancer un certain nombre d’exigences immédiates :
 Droit à la retraite à 60 ans, à 55 ans pour les travaux pénibles et les régimes spéciaux, reconnaissance de la pénibilité de métiers occupés par les femmes.

 Pas de retraite inférieure au SMIC.

 Revalorisation du minimum vieillesse et minimum contributif.

 Abrogation du système de décote, qui pénalise particulièrement les femmes.

 Plan de rattrapage des salaires des femmes au titre de la réparation des inégalités (comme l’ont fait certaines entreprises), ce qui contribue à augmenter les recettes en cotisations pour les retraites et améliore les futures pensions.

 Majoration du taux de cotisation des employeurs pour les emplois à temps partiel, par exemple cotisation sur une base de temps plein.

 Répartition plus juste des bonifications pour enfants.

 Remplacement des mesures de type de l’allocation parentale d’éducation par une mesure égalitaire de congé parental, c’est-à-dire destinée à être prise par les deux parents.

 Amélioration du taux d’emploi des femmes et diminution du temps partiel imposé ou « choisi faute de mieux » par le développement d’un service public d’accueil de la petite enfance, et de services d’aide à la dépendance.

 Des attaques contre les dispositifs familiaux… au nom de l’égalité !

Alors que les dispositifs familiaux permettent de compenser – même insuffisamment- les inégalités de pension entre les sexes, les précédentes réformes les ont réduit, et ils continuent aujourd’hui à être remis en cause, et cela au nom même de l’égalité !

Ainsi de la majoration de durée d’assurance (MDA) qui accordait un an par enfant aux mères dans la fonction publique et deux ans dans le régime général.

Dans la fonction publique, la loi de 2003 a établi l’égalité entre hommes et femmes … par un alignement par le bas. De plus, les nouvelles modalités incitent les mères à interrompre leur activité : pourtant le modèle social de l’interruption d’activité pour s’occuper des enfants ne correspond pas au choix des femmes d’aujourd’hui et va à l’opposé de l’égalité.

Dans le régime général, la remise en cause de la MDA de 2 ans est arrivée en discussion à l’automne 2009, toujours au nom de l’égalité. Suite à l’opposition syndicale, le gouvernement a tranché provisoirement pour un compromis : une année reste attribuée aux mères, l’attribution de la seconde doit se faire à l’un ou l’autre des parents, conformément au choix du couple, ce qui n’est pas satisfaisant. Les inégalités dans le privé étant plus fortes que dans le public, les MDA y jouent un rôle plus important de « compensation » et s’y attaquer a des conséquences plus graves.

Il est inacceptable de faire des économies sur le dos des femmes en supprimant ces dispositifs familiaux qui restent indispensables pour atténuer l’inégalité. Et il est cynique de se réclamer du principe d’égalité pour accroître les inégalités !

Le 23 mars, en grève et dans la rue, pour le pouvoir d’achat, l’emploi et les retraites !


Voir en ligne : Union syndicale Solidaires