Indépendance et moyens de la HALDE menacés : la lutte contre les discriminations sacrifiée ?

dimanche 14 mars 2010


La Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Egalité (HALDE) est une institution récente mais qui a déjà pris une place très importante dans le paysage français pour la lutte contre toutes les discriminations.

Trop pour le gouvernement ? Des projets visent à en réduire le champ d’investigation et les moyens. Le communiqué commun ci-dessous (signé par Solidaires, à laquelle le SUNDEP est affilié) en résume les enjeux.

Le SUNDEP a déjà fait appel plusieurs fois à la Halde, principalement pour des discriminations à l’embauche sur des critères religieux.

Ça a notamment été le cas pour des lauréats de concours de prof des écoles rejetés par l’enseignement catholique sous prétexte qu’ils ne servent pas le « projet éducatif spécifique » de l’enseignement catholique (ils étaient passé par l’enseignement public, ou avaient un nom pas assez « catholique »...).

On le voit, les propos d’un Gérard Longuet, le patron des sénateurs UMP, sur l’opportunité de nommer Malek Boutih à la tête de la Halde (« ... ce n’est pas le bon personnage », il vaut mieux un « symbole du corps français traditionnel ») sont bien partagés !

Par ailleurs, la Halde a remis récemment son rapport annuel.

Communiqué commun du 9 mars 2010

A l’heure où la présidence de la HALDE doit être renouvelée, les organisations de lutte contre les discriminations s’inquiètent des rumeurs persistantes qui depuis de longs mois maintenant font état de menaces lourdes qui pèsent sur la HALDE.

Le projet de défenseur des droits, créé par la révision constitutionnelle de juillet 2008, dont les attributions doivent inclure celles du médiateur de la République, du défenseur des enfants et de la Commission nationale de déontologie de la sécurité pourrait maintenant aussi incorporer celles de l’institution indépendante en charge de la lutte contre les discriminations et pour l’égalité.

Et ce n’est pas la première attaque contre l’institution chargée de la lutte contre les discriminations, déjà en novembre, lors de l’examen du projet de loi de finance pour 2010, un amendement parlementaire avait envisagé une réduction de ses moyens pouvant aller jusqu’à 20% de son budget actuel, budget qui a finalement été effectivement réduit.

Le futur défenseur des droits aura des pouvoirs et des prérogatives importants, notamment un pouvoir d’injonction. Cependant tous les éléments nécessaires à la garantie de son indépendance ne sont pas réunis.

Par ailleurs, et cela est extrêmement problématique, son caractère généraliste fait craindre une dilution des missions spécifiques assurées par chacune des autorités indépendantes qu’il remplacera.

La spécificité de la HALDE est nécessaire pour assurer que la lutte contre les discriminations soit menée sans faiblesse. Ces cinq années d’existence de la HALDE ont été récemment l’occasion pour l’autorité administrative indépendante de dresser un premier bilan, à savoir l’augmentation des réclamations qui est passée de 1500 à 10000 par an et une plus grande notoriété acquise.

La qualité de ses délibérations, l’efficacité de son action et son expertise indéniable ont été saluées.

Pour le gouvernement, cette réalité agace et ce d’autant plus que la HALDE est venue plusieurs fois contredire des projets de loi comme par exemple le projet de loi sur l’immigration, avec l’affaire des tests ADN sur les candidats à l’immigration, ou encore celui sur les gens du voyage.

Elle a, plusieurs fois, rappelé à l’ordre le gouvernement sur des dispositions qu’elle jugeait discriminatoires. Elle a aussi souvent et beaucoup mis la pression sur les employeurs, l’emploi restant, et de très loin, son premier domaine de saisine.

En leur demandant de justifier leurs choix de recrutement, de lui fournir des documents attestant de leur parfaite équité dans les promotions et augmentations de salaire, la HALDE a fait progresser indéniablement la diffusion de la connaissance de l’interdit discriminatoire.

Nous, organisations de défense des droits de l’Homme, des salariés et de lutte contre toutes les discriminations, dénonçons tout projet qui ferait perdre à la HALDE sa spécificité, son expertise, son efficacité et son indépendance, nécessaires pour que les dossiers dont elle se saisit soient menés à leur terme, y compris quand les auteurs de discriminations sont des décideurs économiques ou politiques.

La lutte contre les discriminations nécessitant beaucoup de moyens financiers et humains, Le gouvernement doit montrer sa détermination à faire progresser la lutte contre toutes les discriminations en augmentant les moyens qui y sont consacrés et en garantissant l’indépendance de l’institution qui les combat.

AFIP ; Collectif Interassociatif Sur la Santé (CISS) ; Comité National pour la Promotion Sociale des
Aveugles et Amblyopes (CNPSAA) ; Fédération LGBT ; FNATH ; Fédération Syndicale Unitaire ;
Inter-LGBT ; Inter TRANS’ ; Ligue des Droits de l’Homme ; Mix-Cité Paris ; MRAP ; ORTrans ;
SOS Racisme ; Syndicat de la Magistrature ; Unapei ; Union Syndicale Solidaires