La brève de Décembre

dimanche 5 décembre 2021


Si l’heure du bilan sonne pour J.M. Blanquer en cette fin d’année 2021 et en cette fin de quinquennat d’E. Macron, il est tout sauf glorieux. Le récent réquisitoire du Sénat sur la dégradation du métier d’enseignant.e l’atteste, les réformes des lycées - menées de manière autoritaire en dépit du bon sens et sans l’avis des acteurs de l’Éducation - le démontrent, la gestion plus qu’approximative de la crise sanitaire à l’échelle de l’Éducation nationale le confirme. Et les enseignant.es dans tout ça ? Eh bien, très clairement, ils/elles n’ont plus le moral.

Et si c’était à refaire….
58 % ne choisiraient plus le métier d’enseignant, selon une étude de la MGEN effectuée auprès de 3646 professeur.es. Trop de stress et de violences. Pas assez de considération de la société et de leur hiérarchie.
Comment se portent les enseignant.es après vingt mois de crise sanitaire marqués par les confinements et l’enseignement à distance ?
Le mal-être est profond : 80 % des enseignant.es jugent leur métier stressant. Presque 70 % d’entre eux estiment que l’équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie privée est mauvais.
96 % des enseignant.es estiment que leur profession n’est pas suffisamment valorisée par la société.
Les causes de cette insatisfaction sont multiples : seuls 3 % des sondé.es estiment que leur travail est reconnu par leur hiérarchie ; autant que leur salaire est bon ; 10 % que le climat dans leur établissement est très bon.
Mais, et c’est plus inquiétant, si 92 % des enseignant.es se sentent en sécurité au sein de leur établissement, 30 % affirment avoir été victimes de violence au travail durant les douze derniers mois, 63 % en avoir été témoins. Les faits de violence (insultes, agressions verbales, menaces, agressions physiques, diffamation, etc.) proviennent pour l’essentiel, dans l’ordre, des parents (14,3 %), des élèves (13,5 %), des personnels eux-mêmes (9,6 %).
Conséquence de ce mal être général : si c’était à refaire, 58 % des sondés ne choisiraient plus le métier d’enseignant.e.

Être enseignant.e, pas vraiment pour le salaire….
Un très récent rapport du sénateur de la Meuse, Gérard Longuet, pas franchement connu pour ses idéaux de gauche, pointe du doigt la dégradation, sur 20 ans, des conditions de travail et de rémunération des enseignant.es. Selon le texte, en euros constants, les enseignant.es français.es ont perdu entre 15 et 25 % de rémunération au cours des 20 dernières années.
Le rapport estime à 2 564 € par mois le salaire moyen net en équivalent temps plein. Pour les professeurs de moins de 30 ans, ce chiffre baisse même à 1 806 €. Ces salaires nous paraissent déjà surévalués, assez clairement s’agissant de l’enseignement privé sous contrat. Ces salaires nuiraient de manière évidente à l’attractivité du métier.
Une rémunération peu élevée, d’autant plus quand on la compare à celle des autres pays développés. En France, le salaire statutaire des enseignant.es du primaire et du secondaire après dix ou quinze ans de service est inférieur d’au moins 15 % à la moyenne de l’OCDE, et les enseignant.es commencent et terminent leur carrière avec un salaire inférieur à la moyenne de l’UE, dit le rapport. À l’école élémentaire, le décrochage des salaires est particulièrement frappant – surtout par rapport à l’Allemagne, pays économiquement comparable, où le salaire brut en début de carrière dépasse 65 000 euros, contre 31 000 euros en France.
Une situation paradoxale puisque, selon le texte, les enseignant.es en France passent en moyenne davantage de temps à enseigner devant les élèves que leurs collègues dans les pays européens.
C’est donc un constat sévère qui est dressé par le Les Républicains, G. Longuet. Le Sénat, majoritairement de droite, a d’ailleurs rejeté le projet de loi de finances présenté par le gouvernement, le 23 novembre. Sur l’éducation, premier budget de l’État, avec 56,5 milliards d’euros, M. Longuet fustige le manque chronique d’attractivité du métier d’enseignant, en fort décrochage par rapport au reste de l’Union européenne (UE) – mais aussi par rapport aux salariés du privé.

Le chiffre du mois : 75 millions
C’est la somme que le ministère de l’Éducation a renoncé à dépenser et qui faisait partie du budget alloué à l’Éducation nationale pour 2021. Un comble, alors que les besoins ne manquent pas !
Le MEN aurait-il fait des économies à la faveur de la crise sanitaire avec « de moindres dépenses liées à la crise sanitaire (crédits pédagogiques et formations) » ? Une chose est sûre, Jean-Michel Blanquer a renoncé à dépenser 75 millions d’euros, qui faisaient pourtant partie du budget qui lui avait été alloué pour l’année 2021.
Mais pourquoi ne pas avoir puisé dans ces réserves pour recruter davantage de professeur.es, pour envisager un renforcement de la politique inclusive du Ministère et imaginer le recrutement et la rémunération des AESH, qui protestent depuis plusieurs mois contre la précarité de leurs conditions de travail ? Une question à 75 millions d’euros, justement.

15 euros d’un battement de clic
C’est la somme brute par mois que l’État va prendre en charge pour les cotisations de ses fonctionnaires et de ses agent.es contractuel.les à partir du 1er janvier 2022. Cette somme est non proratisable : en cas de temps de partiel ou d’emploi à temps incomplet (les AESH en particulier), le remboursement sera également de 15 € brut.
Pour en bénéficier, un formulaire et une attestation doivent être transmis via l’application Colibris. La participation forfaitaire sera versée dès janvier ou février (avec effet rétroactif à partir de janvier 2022).

La seule boussole du gouvernement dans son carnet de route : maintenir coûte que coûte les établissements ouverts.

Au MEN, on garde le cap fixé depuis la fin du 1er confinement. Mais face à la 5e vague épidémique et alors même que le taux d’incidence chez les 6/10 ans augmente en flèche depuis la semaine dernière, J.M. Blanquer annonce un changement de méthode à rebours des événements qui dictent le scénario de cette nouvelle vague.
En effet, à partir du 6 décembre au plus tard, les fermetures de classes du premier degré ne seront plus systématiques pour une durée de 7 jours, et ceci même après la détection d’un cas de Covid-19. Seuls les élèves testés positifs resteront à la maison.
Les tests seront, selon les dernières nouvelles, laissés à la seule responsabilité des parents.
Cette procédure qui allège le protocole sanitaire ne semble pas adaptée à la gravité de la situation puisque le taux d’incidence des 6/10 ans a maintenant largement dépassé les plafonds des deux dernières vagues et continue de monter en flèche. Les enseignant.es, qui quant à eux/elles ne sont jamais malades, devraient assurer en modes distanciel et présentiel ?!